09/07/2025

Taiwan Today

Taiwan aujourd'hui

En tressant le bambou

01/07/1991

Pendant près de dix ans, l'Institut provincial de recherches artisanales de Taiwan a attribué chaque année un prix au vannier de bambou Chang Hsien-ping. Les paniers qu'il produit pour l'art floral japonais (ikébana) lui ont aussi fait gagner une grande admiration, en même temps qu'un débouché actif au Japon. Il a ainsi aidé à la renaissance d'un artisanat combien prospère dans la Chine impériale.

Le renom de Chang Hsien-ping comme maître dans l'art de la vannerie trouve ses racines dans son expérience familiale et l'histoire contemporaine de Taiwan. Il est né en septembre 1943 d'une famille d'artisans, soit deux ans avant la fin du demi-siècle d'occupation japonaise de Taiwan. Sa famille est originaire de Yuanli, dans l'ouest de l'île. Le négoce principal de cette petite bourgade était la fabrication de chapeau et de nattes de paille. Ainsi son grand-père, Chang Pao, en avait exporté vers le Japon à travers une coopérative japonaise depuis le début de ce siècle.

Quelques années après la naissances de Chang Hsien-ping, son père, Chang Shou, déménagea dans le village voisin de Tchounan où il installa un métier brut et simple pour le tressage mécanique des chapeaux et des nattes. Il devait fondé deux sociétés qui fournissaient le Japon et l'île, elle-même, ainsi qu'un petit débouché vers la Chine continentale.

Panier en bambou tressé, ayant la forme de vase sacrificiel en bronze de la dynastie Chang (fin XVIe-fin XIe siècles av. J.-C.).

La fabrication des nattes avait commencé comme activité secondaire de ses parents, mais la demande de ressources financières pour élever onze enfants obligea à prendre une décision de telle sorte que cette activité devint la principale de la famille Chang. Ce fut un bon choix. Pendant les fortes saisons, l'entreprise familiale employait jusqu'à une centaine d'artisans qui travaillaient hors de leur domicile, tandis que cinq ou six jeunes coursiers apportaient les matières premières ou livraient les produits finis.

Chang Hsien-ping était le premier né des garçons de la famille, en fait le 5e enfant après quatre filles. Il avait vite compris qu'il aurait une plus lourde responsabilité que ses quatre sœurs aînées et certainement tous ces cadets et cadettes dans l'affaire familiale. Leur pêre n'a jamais forcé ses enfants à s'occuper du commerce de la famille, mais il les avait persuadé de donner un bon coup de main. « Naturellement, tout ce que nous voulions, dit-il, c'était de nous amuser. Cela ne me plaisait pas du tout quand je devais aller y travailler pendant les vacances scolaires. »

Encore au lycée, son père commença à lui apprendre les techniques de tressage de la paille. Dans son enfance, il avait pu en connaître les rudiments en regardant son père et ses ouvriers travailler, mais certainement son père avait préféré qu'il soit au lycée pour lui inculquer son art. Il le prit à ses côtés, lui montrant les astuces du métier et l'enfant devait refaire les mêmes gestes.

Malheureusement, Chang Shou mourut en 1969 à l'âge de 54 ans après un douloureux cancer qui avait duré quelque deux ans. Chang Hsien-ping avait vingt-six ans. Il venait d'être libéré de ses obligations militaires et n'était pas marié. Il n'hésita pas à remplacer son père comme chef de l'entreprise familiale qui à cette époque exportait des toiles de paille tressée au Japon où les acheteurs retransformaient le produit semi-brut en sacs ou et nattes à coucher plus à la mode.

Un tressage compliqué et un modèle raffiné sont le mérite d'un grand art.

Il n'a jamais pensé alors pouvoir faire autre chose. Il renomma l'entreprise familiale du nom de Lilin qui exporte aujourd'hui deux à trois mille toiles de paille tressée multicolore par mois au Japon. La toile mesure 60 cm sur 110 cm, coûte environ 3,70 dollars américains pièce et est disponible en plus de 60 modèles. Il en a créé une vingtaine, le reste l'ayant été par son père.

La demande japonaise en produits de qualité a donné une extrême importance au contrôle de la qualité. De plus, l'esprit de dévouement de son père et son insistance sur de plus grandes normes ont laissé une forte empreinte. Il s'assurait que chaque toile avait un nombre identique de fils. Il avait une parfaite compréhension du métier à tresser, était au courant de la tension exercée, savait où le modèle péchait par un défaut de symétrie et connaissait exactement l'harmonie des couleurs requises.

Au bout de cinq ans après la reprise de l'entreprise familiale, un partenaire commercial lui avait demandé son aide du Japon de lui trouver un fabricant taiwanais de produits en bambou de haute qualité, principalement des lanternes et des paniers, car une compagnie japonaise désirait sceller un marché à long terme avec un tel fournisseur. Chang Hsien-ping chercha en vain dans les villes voisines. Il n'avait pas trouvé le fournisseur requis. Il osa alors se lancer dans quelques exemples, mais ne pas du tout satisfait du résultat. Il avait pensé que cela eût été plus facile, que cela était à peu près semblable au tressage de nattes.

Pourtant, il poursuivit ses efforts dans cette direction en tressant de fines lamelles de bambou de la même manière que la paille. C'était un essai, mais le défaut persistait. En fin de compte, il réalisa son erreur. Le tressage de la paille pour natte et celui du bambou sont totalement différents. Trois années s'écoulèrent avant qu'il ne réussisse à produire une lanterne en bambou qui satisfassent ses goûts personnels. Les acheteurs japonais furent ravis du résultat, et Chang Hsien-ping exporte maintenant plus de trois mille lanternes en bambou tressé par mois au Japon. Les accessoires électriques sont déjà fixés avant l'expédition.

Un tel panier relève plus de l'art que de l'essai ou de l'amateurisme, dit Chang Hsien-ping.

Il avait fait pleinement confiance à son épouse, Chen Pi-luan, pour tbut le succès commercial et artistique. Elle surveillait en usine la production de masse des divers types d'articles en bambou. Quand ils se sont mariés, tout était neuf pour elle, mais aujourd'hui sa lucidité dans l'article commerciable vaut celle de son époux. Avec sa femme totalement responsable de l'usine, Chang Hsien-ping dit à ses amis qui le taquinent qu'il appréciait beaucoup la réputation fondée sur le travail de son épouse.

Le contrôle de la qualité est un facteur important de l'entreprise de Chang Hsien-ping. Deux fois par semaine, il fait un tour de trente minutes de chez lui à l'usine sise en banlieue pour inspecter la production. Il s'assure que les articles artisanaux soient de longue consommation et s'attarde volontiers sur les détails. Quelques instants d'impatience ou de négligence peuvent tout faire basculer. Un rapide coup d'œil lui suffit pour détecter le défaut. Pour illustrer la nécessité d'un œil averti, il prend une lanterne. « Mais elle est complètement déformée, dit-il, car les deux lattes sont tressées sous un mauvais angle. »

Conçu pour l'art floral dont il est un complément heureux.

Malgré les bénéfices que ces exportations de bambou rapportent à l'entreprise, Chang Hsien-ping souhaite un jour consacrer tout son temps et son énergie à ce qu'il entrevoit de plus défiant et plus inspirateur de la vannerie. Mais il a promis à ses clients japonais des liens de longue durée, et ceux refuseraient son abandon du marché.

L'amour que Chang Hsien-ping exulte pour la vannerie a débuté il y a 5 ans pendant qu'il produisait en masse des produits en bambou tressé. Il s'exerça d'abord dans la confection de paniers qu'on utilise généralement pour l'art floral dans les réunions de thé japonaises. Il trouva que la confection de milliers de nattes, de lanternes et d'autres articles en bambou tressé offrait mille issues à toute son imagination. Et il décida qu'il pourrait faire autre chose avec le bambou, quelque chose justement qui l'attirerait plus vers une créativité personnelle. L'apparence relativement fade de paniers jumellés pour l'art floral le fascinait. Et il se plongea dans cet étude. Cela lui prit environ trois mois avant de finir son premier panier. Mais il se convainquit que la vannerie lui apporterait créativité et habileté particulières. Il dut alors dépensé plus de temps à découvrir ce qu'il pouvait réellement faire.

Son premier panier le combla de joie, même s'il n'était pas exactement conforme à l'original qu'il voulait imiter. Mais ces quelques mois de vannerie lui avait donné la chance de comprendre les qualités et les caractéristiques du bambou. Et pénétré de cette complexité, il savait désormais qu'il pouvait en créer de nouvelles formes.

Ce modèle semble inspiré d'autres du Sud-Est asiatique.

 

Son pouvoir créateur fut bien vite reconnu de ses partenaires japonais. Son premier panier fut vendu pour 740 dollars américains, et avant peu, les commandes se mirent à affluer. Quelques-unes étaient de l'ordre d'une vingtaine de paniers d'une modèle spécifique, et d'autres fois, les acheteurs en désiraient jusqu'à une centaine. Certains paniers se vendent aujourd'hui plus de 2 000 dollars américains la pièce. Ayant produit cinq modèles, Chang Hsien-ping se mit à suivre le cri du cœur, cessant d'imiter d'autres originaux pour ceux de son imagination.

Considérant la joie de créer supérieure à l'article lui-même, il se préoccupa alors de l'avenir de son art, ainsi que de la survie d'autres arts artisanaux de Taiwan devant la mécanisation industrielle et l'internationalisation des goûts.

Pour lui, il fallait décider des adaptations nécessaires à la vannerie du bambou et à la confection des panier en vue d'assurer un développement continu. Par ailleurs, il se demandait comment il pouvait aider les jeunes intéressés à ce travail pénible et de longue durée qu'exigeait l'art du bambou. Il repensa à la mécanisation, un chemin que son père avait emprunté quelques années plus tôt pour les nattes de paille. Mais cette décision aurait quelque influence sur la qualité, tout en soulignant que les nattes tressées à la main dénotent une différence des autres dont chacune possède un marché et des fonctions propres, alors que celles faites main expriment un sentiment au toucher.

D'après lui, c'est encore plus compliqué pour l'art du bambou que pour le tressage de nattes de paille. Les cannes de bambou qui se débitent mécaniquement peuvent être utilisées pour des lampes ou des paniers à fleurs en bambou brut. La grâce d'un panier jumelé demande que la canne de bambou soit taillée à la main et que l'artisan en comprenne réellement les différents types et leurs caractéristiques. Les cannes sont choisies d'après leur longueur, la distance entre les nœuds et la flexibilité de leur texture.

Une esthétique nouvelle qui s'allie parfaitement à une décoration végétale.

« Je n'aurai jamais pensé, la première fois que j'ai commencé, que le bambou koueï avait cet aspect, explique-t-il. Maintenant, je le préfère à tous les autres.» En effet, le bambou koueï atteint une maturité vers l'âge de trois ans. Ses cannes ont des fibres très sérrées qui ne sont pas du tout grossières.

Chang Hsien-ping se promène souvent les montagnes voisines pour chercher cette variété de bambou. Il donne des instructions à ses ouvriers de ne point endommager l'écorce verte et souple des cannes au moment de l'abattage. Amenées chez lui à Tchounan, les cannes sont placées dans un récipient de 3 mètres de long, rempli d'eau et de soude. Puis, les cannes sont chauffées pendant environ 30 minutes. Après quoi, on les retire et y coupe tous les morceaux résiduaires. Enfin, on les fait sécher au soleil une dizaine de jours.

On peut stocker des cannes de bambou séché pendant très longtemps, mais, à la saison des pluies, elles peuvent moisir, ce qui signifie que chacune d'elles doit être vigoureusement frottée. En général, le bambou prend le moisi après deux ou trois ans. Toutefois, il écarte l'emploi de machines à sécher, car le vert original de la plante ne vire à un magnifique brun malt que sous l'action directe de la lumière solaire. La canne verte s'emploie dans la fabrication en masse des lanternes. Mais pour la fabrication de panier, on en pèle l'écorce verte et on brise les cannes en plusieurs fines lattes. La plus fine que Chang Hsien-ping utilise n'a que 0,6 mm de large et 0,3 mm d'épaisseur.

Il fait remarquer que l'usage de très fines lamelles n'est ce qui donne cet aspect délicat au panier. Le mystère réside plutôt dans l'éclatement soigneux des cannes qui donne des lamelles pratiquement identiques tant en largeur qu'en épaisseur. Chaque lamelle est ensuite bien ébarbée et polie en arrondissant les bords angulaires, et les bouts taillés en douceur. Si on a quelque difficulté à claquer une canne à un nœud, il devint presque impossible d'obtenir des lamelles souples. Un bon artisan doit d'abord apprendre à claquer une canne de bambou avec les mains. Jusqu'à présent, aucun de ses ouvriers n'a réussi à bien maîtriser la technique.

Des années d'expérience sont essentielles à la confection des plus beaux paniers en bambou tressé. Il faut bien comprendre les caractéristiques propres du bambou, sa légèreté, sa flexibilité, sa force et son élasticité. Chang Hsien-ping conçoit et tresse ses paniers dans des formes et des tailles variées. Il imite également le styles des paniers de l'art floral ou ceux antiques qu'il a pu apercevoir dans des peintures chinoises. Il s'est aussi penché sur la vannerie du bambou ou du rotin des Philippines, de l'Indonésie, de l'Egypte, de la Thaïlande et de la Chine continentale, ainsi que, bien sûr, des aborigènes de Taiwan.

Le panier tressé reflète un usage fonctionnel et un trait culturel des vanniers. Mais il est content de pouvoir découvrir de telles similitudes dans la vannerie des différentes civilisations. Ce qui l'a peut-être le plus surpris est d'avoir vu les mêmes dessins rhombiques qu'il avaient utilisés pour un panier à fleur sur quelques objets artisanaux d'Egypte antique exposés au Musée national d'Histoire de Taipei. Malgré son grand succès artistique, il demeure peu satisfait. Il estime avoir peu créé et encore moins découvert de nouvelles méthodes de vannerie qui lui soient propres. Il n'a fait qu'améliorer les techniques des autres, s'apitoie-t-il.

Mais un regard sur les paniers jumelés de Chang Hsien-ping par un œil expert confirmera que cette œuvre présente une variété agréable dans la conception et le style. Doux et sans prétention, comme le sont toujours de jolis paniers, ceux de Chang Hsien-ping exprime également une pensée et un art délicat. Ainsi, le fait d'avoir peint ou teint un panier n'est venu qu'après avoir compris qu'une couche pouvait protéger le matériau de toute destruction par les insectes.

Peindre le bambou n'est pas si facile, surtout quand ses clients japonais lui commande l'emploi d'une peinture de très haute qualité. Il a cherché en vain par une étude autodidacte, la lecture d'ouvrages spécialisés de chimie, la visite de plusieurs entreprises de meubles pour connaître leurs méthodes. Il n'empêche que la couleur de ses produits en bambou tressé a bien défini son style. Il choisit la peinture ou la teinture, selon l'effet esthétique qu'il veut rendre, en jonglant avec les nuances du brun. Il applique plusieurs couches, jusqu'à quatre ou cinq, plaçant l'article à sécher entre chaque couche. Son art est l'habileté de parvenir à une couleur qui présente brillant et lustre.

C'est une tâche bien difficile de trouver des ouvriers assez intéressés et qualifiés à l'art de la vannerie et il faut également former de nouveaux talents. Chang Hsien-ping pense que son père s'est justement installé à Tchounan parce qu'il n'a jamais pu trouver assez d'ouvriers qualifiés à Yuanli. Il a eu le même problème pour pouvoir garder ses seize ouvriers. Il en a embauché jusqu'à trente ou quarante, mais peu désirent faire une carrière artisanale où il faut se concentrer à trop de détails. De plus, la rémunération est relativement limitée.

La taille des cannes de bambou en fines lamelles pour la vannerie est aussi une technique de précision.

 

Le maintien d'un système efficace pour organiser les ouvriers dans les trois branches des opérations n'est pas non plus de toute simplicité. Les employés de Chang Hsien-ping sont formés sur un seul genre d'opération. Comme le passage de l'une à l'autre est rarement possible, on ne peut déplacer les ouvriers selon les nécessités saisonnières d'une opération ou d'une autre. Le fabricant de nattes en paille a peu de connaissances en lanternes en bambou, ou encore celui de lanternes en bambou n'ose s'aventurer dans la confection d'autres articles en bambou ou en rotin.

Les ouvriers ont le choix d'un mode de rémunération, soit il reçoivent un salaire fixe pour un emploi du temps fixe, soit ils sont payés à la pièce. Ils ont encore le choix de venir travailler à l'usine de Chang Hsien-ping ou de le faire chez eux au village de Fonglaï, dans la montagne. Les villageois sont pour la plupart des Chinois hakkas ou des aborigènes des tribus Saïssiyat ou Atayal.

Il faut en général six mois pour apprendre les rudiments d'un travail artisanal. Ceux qui sont plus habiles et plus rapides ont besoin de moins de temps, mais il faut en gros un à deux ans pour bien maîtriser l'art. Alors, la natte en paille tressée devient presqu'une routine qui contraste avec les nombreuses variantes dans l'art de la vannerie du bambou. C'est d'ailleurs assez délicat de comparer les talents dans la manipulation de ces deux types de matériau.

Chang Hsien-ping souligne par ailleurs que la concentration de l'esprit sur une technique artisanale est très importante. Une de ses ouvrières fut enthousiaste au début de l'apprentissage, mais elle a modéré son élan par la suite. Elle n'achève maintenant que deux ou trois paniers par an. Elle a certes besoin de plus d'expériences. Bien qu'elle ait fabriqué six années durant des nattes en paille, son œuvre en vannerie ne peut se comparer.

C'est à partir du fond que prend la forme d'un modèle.

 

Chang Hsien-ping avait également l'intention de former les personnes habiles à l'art du bambou. Il y a plusieurs années, Mlle Chang Yueh-chi, une jeune Saïssiyat s'était présentée à lui. La vue de l'étiquette de l'entreprise de Chang Hsien-ping sur une œuvre exposée à l'Institut provincial de recherches artisanales de Taiwan, dans le centre de l'île l'avait inspirée de tenter une nouvelle approche dans une vieille affaire. Pendant des années, elle chercha à assurer les moyens d'existence des aborigènes de Fonglaï en les encourageant à apprendre le tricotage. Sans succès. Alors, quand elle vit les articles en bambou de Chang Hsien-ping, elle s'emporta pour essayer une nouvelle voie.

Chang Hsien-ping accepta de travailler avec les aborigènes. Aujourd'hui sept femmes s'assoient ensemble au centre du village et tressent divers articles en bambou. Il se rend régulièrement à Fonglaï pour leur apprendre de nouvelles formules, les diriger. leur livrer les matériaux et recueillir leurs articles achevés. Il a établi des contacts chaleureux avec ses ouvrières, et le rapport qu'il entretient avec elles a beaucoup contribué à un climat favorable à la survie de cet art.

Chang Hsien-ping et son épouse, Chen Pi-luan, jette un dernier coup d'œil sur un article pour l'exportation.

Mlle Chang Yueh-chi parle volontiers de son maître artisan. Bien que l'Etat alloue une petite subvention pour la formation professionnelle des aborigènes, elle n'a jamais pu trouver quelqu'un qui leur dispense une matière. Jamais, Chang Hsien-ping n'a refusé de venir enseigner son art à ceux et celles de sa tribu dans les montagnes en dépit de son agenda surchargé. Il n'a pas besoin d'eux, mais eux ont besoin de lui. Il a su fouiller dans sa poche, dit-elle avec humour.

Mlle Pan San-mei, également une jeune Saïssiyat, avait observé depuis l'enfance son père fabriquer des articles en bambou tressé. Mais, elle ne rencontra pas Chang Hsien-ping avant qu'elle ne soit au lycée. Ce dernier devint son mentor, puis aussi son employeur. De lui, elle a appris à tresser le bambou. C'était si difficile les deux premières années qu'elle en était découragée. Heureusement, Mlle Chang Yueh-chi l'encouragea à persévérer. Après six années, Mlle Pan San-mei devint une vannière émérite en bambou et en rotin. Elle fait l'admiration de toute sa tribu. Ne travaillant plus aujourd'hui chez elle, elle tresse le bambou avec diligence et beaucoup d'amour pour cet art. « Je suis véritablement comblé que tous et toutes aient pu apprendre », dit Chang Hsien-ping.

La disposition des lamelles pour un panier exige des mains expertes... et des pieds adroits.

Aujourd'hui, l'avenir de l'art de Chang Hsien-ping semble un peu mieux assuré. Il rappelle toujours le temps où il combattait pour créer ses premières lanternes en bambou tressé il y a huit ans et quelques années antérieures quand il s'asseyait auprès de son père pour apprendre le tressage et fournir les efforts nécessaires à une meilleure qualité. L'élégance de ses œuvres qu'on peut trouver dans une maison de thé japonaise ou sur une table de maison porte témoignage de son succès en ressuscitant un ancien art.

 

Photographies de Lin Bor-liang.

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